A peine arrivée auprès de sa formatrice, Alea dut repartir. En effet, on lui avait confié une nouvelle responsabilité au sein du clan et elle se devait de superviser dorénavant les diplomates envoyés à la rencontre des autres clans. Comme à son habitude, elle se mit à laisser ses pensées vagabonder. Après une bonne heure à tergiverser sur la conduite à tenir à propos de sa nouvelle fonction, elle passa à un sujet beaucoup plus divertissant. Caressant machinalement la fourrure de Sérak pour lui intimer l’ordre de ralentir un peu, Alea songea, donc, à ce qu’elle pourrait organiser pour son enterrement de vie de jeune fille. Torturer des undeads asservis par les drows ? Organiser une chasse au gnome ? Lécher Gottlieb, recouvert de gâteau ? (c’est lui qui a proposé, hein! Alea est, bien entendu, innocente quant à cette initiative) …
Encore toute amusée de ses idées, Alea remarqua à peine que son tigre s’était arrêté. Ils se trouvaient tout près d’un chemin escarpé et peu usité. Alea fut alors contrainte de descendre de Sérak et de continuer à pieds, guidant l’imposant félin par la bride. La progression était de ce fait assez lente et Alea commençait à s’impatienter. C’est alors qu’elle vit à sa gauche en contre bas, deux yeux jaunes et luisants qui l’observaient. La bête était dissimulée dans les fourrées et Alea ne pouvait pas évaluer sa taille ni sa nature mais elle remarqua, cependant, que même Sérak était devenu nerveux. Le cœur de la drow bondit dans sa poitrine. Se pouvait-il que cela soit un loup-garou ayant échappé à l’éradication de sa race ?
Bien que soigneuse, Elle avait déjà achevé un de ces monstres en en avait gardé pour preuve une dent.Mais elle avait subi peu après l’attaque sauvage d’un autre loup, devenant elle-même une belette-garou. Elle se souvint de cette période où son âme était prisonnière dans ce corps étranger. Elle pouvait voir tout ce qu’il se passait, impuissante. Au début elle avait essayé de résister, de pousser sa volonté pour lutter contre le garou qu’elle était, mais ça avait été peine perdue. Puis elle avait ressenti cette impression de puissance, le goût du sang, la fureur. Loin de continuer à lutter pour redevenir celle qu‘elle avait été, elle avait elle-même fait ressortir sa sauvagerie, encourageant le garou à déchiqueter les elfes sur son passage, à griffer, mordre, dépecer … Il n’y avait plus d’alliés ni même d’amis. Si de valeureux héros ne l’avaient pas sortie rapidement de cet état, Alea y aurait certainement perdu la raison. Déjà elle n’était plus la même et il lui avait fallu un moment pour tuer de nouveau. Elle s’était alors consacrée entièrement aux soins qu’elle pouvait prodiguer. Encore maintenant, il lui arrivait de ressentir tout le pouvoir qui avait été en se possession Cela avait été une expérience riche en enseignements, certes, mais aussi quelque chose de très éprouvant.
Et Alea ne souhaitais certainement pas la revivre. Aussi elle se devait de réfléchir vite au moyen de se soustraire au regard qui pesait sur elle. La drow ne désirait même pas savoir si c’était bien ce qu’elle craignait, ni si elle pouvait l’affronter seule maintenant qu’elle était plus forte. Elle évalua la distance qui la séparait d’un terrain à nouveau praticable. Une fois sur Sérak, elle pourrait regagner un endroit plus sur au plus vite. Elle poussa le tigre tout en évitant de regarder en arrière. La fuite n’était certainement pas le moyen le plus digne de s’en sortir mais il est des situations où c’est le moyen qui permet le mieux de s’en tirer sain et sauf (et rappelons le, Alea a un enterrement de jeune fille à préparer).
Sujet: De Zaran à Sérak 
